De Xi’an à Tabriz. Octobre/novembre/décembre 2002 – mai/juin 2005.
« Kashgar au seuil de deux mondes ». 5/5.
Le marché est une mare de tons neutres. Le pelage et la fourrure des animaux : noir, gris, beige, brun, chamois, roux, écru, acajou. Les chapans, « manteaux », et les vestes des hommes : noir, gris, ardoise, bleu marine, marron. Les chapeaux et les casquettes : anthracite, noir, gris, beige, blanc cassé. Harnais, selles et colliers, de cuir et de fer : gris, châtain, acier, brun tabac. Le sable : ocre. Les palissades en bois. Les cordes : beige, blanc cassé. Les feuilles argentées des peupliers. Des teintes d’un monde sans prétention. Une palette de couleurs harmonieuses qui se détache contre un ciel limpide, bleu intense.
Les mets sont préparés sur place. Les effluves provenant des échoppes, de thé, de viandes, de pâtes, se mélangent, se marient, se découvrent. La viande est hachée, mélangée aux oignons, poivrons et aulx avant d’être cuite. L’huile bouillonne dans d’énormes poêles noires. Des brochettes d’agneau crépitent sur les braises des feux ouverts dégageant des nuages de fumée et l’odeur de la viande grillée et du cumin. Des pâtes sortent des marmites fumantes, des boulettes de viande flottent dans des sauces pimentées. De la pâte est malaxée avec de grands gestes, les laghmans voltigent dans les airs. Des bols de soupe aux nouilles sont remplis. Les nans, petits pains ronds, s’empilent sur de minuscules tables, du raisin vert et du melon tranché sont étalés à même le sol. Des gobelets de lait caillé rafraîchi avec de la glace pilée et des petits bols de thé brûlant circulent.
Autour de longues tables, baguettes en main, se mélangent jeunes en costume et béret et vieux à l’allure patriarcale. Un festin !
Et puis, dès le crépuscule, le calme revient. Les marchands rangent leurs étals, les bruits s’estompent. Hommes, femmes et enfants plient bagage et prennent le chemin de la maison, lourdement chargés. Les camions quittent la ville en crachant des nuages de fumées noires. Du haut d’un camion, deux vaches observent le défilé avec dédain. Des carrioles tirées par des chevaux manœuvrent entre piétons et cyclistes et des caravanes de petits ânes gris lourdement bâtés trottinent stoïquement sur le bord des routes pour rentrer à la campagne.
Les innombrables peupliers dessinent des ombres allongées sur le désert. Le ciel est voilé de poussière de sable en suspens et une atmosphère mélancolique s’abat sur Kashgar.








