Une immersion en Arménie et en Haut-Karabagh. Juin 2009.
« Le puits profond de saint Grégoire. 2/2 .»
Le premier lieu saint de l’Arménie chrétienne sera l’église édifiée au-dessus de la fosse à Artashat où fut emprisonné Grégoire. Elle se situe dans l’angle nord-ouest de la cour. Nous poussons la porte. Elle s’ouvre avec un grincement sinistre. Nous avançons dans la pénombre. À droite de l’autel, une trappe laisse entrevoir une échelle.
Je descends avec précaution dans l’abysse. Les barreaux en métal sont tordus et glissants. Dix mètres plus bas, dans la lumière faible d’une ampoule, je contemple la petite pièce circulaire. Les murs sont grossièrement taillés dans la roche, l’air est confiné. Un petit bouquet de fleurs des champs a été déposé devant une statue de la vierge. Les flammes de quelques cierges sur l’autel vacillent et dessinent des ombres mystérieuses sur les murs et la coupole rudimentaire recouverts d’ex-voto gravés par des pèlerins au cours des siècles. L’humidité est pénétrante.
C’est ici, dans ce khor virap, fosse profonde, que Grégoire croupit treize années de sa vie. J’ai hâte de remonter, fuir cet endroit dépourvu de toute humanité. M’échapper de cette atmosphère étouffante. Quitter ce lieu oppressant qui est pourtant le fondement du christianisme en Arménie.
Dehors, l’air est devenu vaporeux. Le sommet de l’Ararat s’est réfugié au fond d’un édredon de nuages. Le gardien, affaissé sur sa chaise à l’ombre du portique, est concentré sur son chapelet. Prie-t-il pour qu’un jour la montagne revienne de nouveau au peuple arménien ?
La petite église capte les derniers rayons du soleil. Le sanctuaire s’épanouit dans les nuances chaudes du tuf orange et ocre contrasté de basalte gris ajoutant la touche d’austérité que mérite un tel lieu.


